Le contexte de l’affaire

En avril 2012, une société en acquiert une autre, spécialisée dans la distribution de matériel électrique et employant plus de 300 salariés répartis sur 40 agences. Suite à cette acquisition, une procédure de licenciement collectif pour motif économique est envisagée, avec consultation du comité d’entreprise, à compter du 20 décembre 2012, sur le projet de réorganisation et le contenu du PSE. Le 8 octobre 2013, dix-sept salariés sont licenciés et saisissent la juridiction prud’homale pour contester la légitimité de leur licenciement et demander le versement de diverses indemnités.

La clause litigieuse

Le PSE contient une clause subordonnant le versement d’indemnités à :

  • l’absence de contentieux collectif des instances représentatives du personnel (comité d’entreprise et CHSCT) sur la régularité de la procédure de licenciement économique et les mesures de reclassement proposées ;
  • l’absence de contentieux individuel sur le licenciement économique.

La décision de la Cour de cassation

La Cour de cassation confirme l’analyse de la Cour d’appel de Toulouse qui avait estimé que cette clause du PSE portait une atteinte injustifiée et disproportionnée au droit d’agir en justice reconnu à tout salarié. Elle rappelle que, selon les articles L. 1121-1 du Code du travail et 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, une clause subordonnant le bénéfice d’un droit résultant de la rupture du contrat de travail à la renonciation du salarié à contester le bien-fondé de cette rupture est nulle.

La Cour de cassation rejette également l’argument de l’employeur selon lequel les salariés n’ont subi aucun préjudice car la clause en question n’a pas été mise en œuvre : elle souligne en effet que cette clause a bien exercé sur eux une certaine pression, leur occasionnant un préjudice, certes immatériel mais réel. En conséquence, la chambre sociale confirme le versement de dommages-intérêts aux salariés concernés (soit 2 500 € pour chacun) et rappelle que l’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond.

Les trois points clés à retenir 

  • La Cour de cassation rejette la licéité d’une clause insérée dans un plan de sauvegarde de l’emploi qui conditionne le versement des indemnités qu’il prévoit à la renonciation par les représentants du personnel et les salariés à toute action en justice.
  • Une telle clause porte une atteinte injustifiée et disproportionnée au droit d’agir en justice reconnu à tout salarié.
  • Cette clause, bien que jamais mise en œuvre, a bien exercé sur les salariés une certaine pression, leur occasionnant un préjudice, certes immatériel mais réel.