Un outil de progrès social central mais perfectible

« L’index de l’égalité professionnelle est aujourd’hui devenu un label susceptible de rejaillir sur l’image et l’attractivité des entreprises. En outre, cet outil a grandement contribué à la prise de conscience des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes », expose Séverine Aubert. Pour autant, cet indicateur ne reflète que très partiellement la réalité des inégalités professionnelles. « Seul 1 % des entreprises sont assujetties à cette obligation, qui ne couvre par conséquent qu’un quart des salariés, précise le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes dans un rapport du 7 mars 2024. De plus, la méthode de calcul retenue n’intègre pas le temps partiel, qui représente à lui-seul une source d’inégalité professionnelle, 80 % de ces emplois étant occupés par des femmes ».

Pour Maud Volny, certains indicateurs de l’index sont particulièrement pertinents et jouent un rôle clé dans la lutte contre les inégalités. « En ce qu’il met en lumière d’éventuelles inégalités structurelles quant à la progression de carrière, l’écart entre les promotions est particulièrement intéressant. De même, l’indicateur sur les augmentations au retour de congé maternité est un levier important de la réduction des discriminations liées à la parentalité ». Néanmoins, selon elle, certains points de l’index mériteraient d’être revus ou ajustés. « Les classifications socioprofessionnelles établies pour calculer les écarts de rémunération pourraient bénéficier d’une segmentation affinée afin de refléter plus justement la réalité des métiers. L’indicateur sur les augmentations individuelles pourrait également être modifié pour tenir compte du niveau réel de revalorisation des salaires : en l’état, il ne mesure que le pourcentage d’augmentation et peut être contourné par les entreprises en procédant à des augmentations minimes ».

Comment les obligations liées à la publication de l’index sont-elles suivies par les entreprises ?

L’index de l’égalité professionnelle doit être publié le 1er mars de chaque année, au plus tard. « Au 1er mars 2024, 23 % des entreprises n’avaient pas respecté cette obligation, en dépit de la sanction financière encourue. Dans notre pratique quotidienne, nous constatons que cette étape de publication est plutôt bien intégrée par les services RH et que certaines erreurs de traitement sont corrigées d’une année sur l’autre. Toutefois, beaucoup d’entreprises se contentent encore de remplir cette obligation, sans véritablement s’emparer du sujet de l’égalité femmes-hommes », constate Séverine Aubert. Selon Maud Volny, « les sanctions ne sont pas suffisamment dissuasives, peu d’entreprises étant contrôlées sur leur mise en œuvre de mesures correctives lorsque leur note est inférieure à 75 ».

En outre, l’avocate spécialisée en droit du travail souligne que « certains écarts de rémunération résultent souvent de nombreuses années de pratiques salariales qui nécessitent d’être corrigées, ce qui peut difficilement être résorbé dans le délai légal de trois ans imposé aux entreprises. Pour cette raison, le calcul de l’index doit être fait avec sérieux, et le plan d’action négocié et mis en place doit comporter des mesures effectives, efficaces et réalistes ». Un point de vue partagé par Maud Volny, qui précise que « l’implication de la direction générale, des services RH, des représentants du personnel, et des salariés, est une condition clé du franchissement du plafond de verre ». 

La mise en place et le pilotage du plan d’action nécessitent une organisation structurée. Pour coordonner les différentes initiatives et en assurer le suivi, il est conseillé de désigner un référent égalité ou de faire appel à un prestataire externe afin d’être accompagné dans la mise en œuvre de ce plan, l’objectif étant de renforcer durablement l’engagement de l’entreprise en faveur de l’égalité professionnelle.